La défaillance de la fusée Soyouz survenue jeudi n’a pas fait de morts, mais l’incident pourrait nuire à la mission première de la Station spatiale internationale : la recherche scientifique. Portrait de ce laboratoire hors du commun qui devra pour l’instant se passer de deux éléments clés.
Dans les heures qui ont suivi le lancement raté de la fusée Soyouz devant transporter le cosmonaute russe Alexeï Ovtchinine et l’astronaute américain Nick Hague jusqu’à la Station spatiale internationale (SSI), les questions ont été nombreuses et les réponses, un peu moins.
On sait qu’aucune fusée ne rejoindra la SSI d’ici la conclusion de l’enquête menée par l’agence spatiale russe, dont les premiers résultats sont attendus le 20 octobre. On sait également que les trois astronautes qui se trouvent actuellement à bord de la station spatiale y resteront sans doute plus longtemps que prévu, eux qui devaient rentrer sur Terre en décembre.
On ne sait cependant pas si le lancement de la mission de l’astronaute canadien David Saint-Jacques, prévu le 20 décembre, sera reporté ni si les actuels occupants de la SSI pourront prolonger leur séjour au-delà de janvier prochain, lorsque leur vaisseau aura été amarré à la station spatiale pendant plus de 200 jours.
Certains observateurs ont d’ailleurs évoqué la possibilité que l’Allemand Alexander Gerst, l’Américaine Serena Auñón-Chancellor et le Russe Sergueï Prokopiev laissent derrière eux une station spatiale inhabitée, qui pourrait demeurer en orbite en étant contrôlée à partir du sol.
Chose certaine, les événements de jeudi auront un impact sur les activités de la SSI, du moins à court terme, a noté l’agence spatiale européenne dans une courte déclaration diffusée jeudi. Et puisque l’équipage de la station spatiale devra pour l’instant se débrouiller avec deux hommes en moins, les activités de recherche menées en continu depuis des années dans ce laboratoire orbital pourraient écoper.
Occupation constante
L’Agence spatiale canadienne soutient que la Station spatiale internationale « constitue le plus important projet scientifique international à ce jour ». Ce laboratoire a été construit par le Canada, les États-Unis, la Russie, le Japon et onze pays d’Europe, qui ont pu assembler toutes ses composantes au terme d’environ 50 missions spatiales.
La SSI, dont la superficie équivaut à celle d’un terrain de football canadien, a été occupée sans interruption depuis novembre 2000 par des équipages qui se sont relayés à intervalles réguliers, tous les six mois environ.
Au fil des ans, les astronautes qui s’y sont succédé ont permis de faire avancer la science à grande vitesse. À titre d’exemple, lors sa mission de cinq mois, le Canadien Chris Hadfield et ses collègues ont effectué pas moins de 130 expériences scientifiques différentes.
Préparer la conquête de Mars Plusieurs expériences scientifiques menées à bord de la Station spatiale internationale ont permis de comprendre les effets d’un voyage dans l’espace sur le corps humain. À terme, les différents projets de recherches pourraient permettre de préparer une mission sur Mars. Les plus grandes avancées en la matière ont possiblement été réalisées grâce au voyage de Scott Kelly, qui a habité la SSI pendant un an à partir de mars 2015, pendant que son jumeau identique Mark est resté sur Terre. Selon les premiers résultats préliminaires publiés en 2017 dans la revue Nature, les tests ont notamment révélé que des portions d’ADN de Scott Kelly situées à l’extrémité de ses chromosomes ont allongé lors de son séjour dans l’espace, ce qui pourrait révéler un effet positif de la vie spatiale. Il faudra sans doute plusieurs années pour interpréter les résultats de l’ensemble des tests effectués sur les deux frères.
Contribution canadienne Les expériences scientifiques menées par des chercheurs canadiens fournissent aujourd’hui des pistes de réponses aux astronautes, mais aussi aux humains sur Terre. Une étude sur le rayonnement auquel les astronautes sont exposés a par exemple permis d’améliorer un détecteur maintenant utilisé dans plus de 1000 centres d’oncologie dans le monde, tandis que des recherches sur le coeur des astronautes, qui perd en élasticité dans l’espace, semblent indiquer qu’une séance quotidienne d’exercice n’est pas suffisante pour maintenir une bonne santé cardiovasculaire lorsqu’on adopte un mode de vie sédentaire.
Micro-organismes résistants Les nombreuses missions spatiales ont démontré que certains micro-organismes sont en mesure de résister au voyage spatial, même lorsqu’ils sont exposés à des conditions et des températures extrêmes. Cela laisse croire qu’on pourrait les transporter sur une autre planète, mais aussi qu’il est possible que la vie sur Terre tire son origine… d’une autre planète.
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