Une nouvelle estimation de la quantité de matière noire contenu dans le Grand Nuage de Magellan conduit à penser que sa masse est deux fois plus importante que ce que l'on croyait. L'attraction de la Voie lactée devrait donc être si forte que les deux galaxies devraient entrer en collision dans deux milliards d'années. Le quasar de notre Galaxie devrait alors se rallumer.
Au cours des dernières décennies, les télescopes ont produit de nombreuses images de galaxies en interactions, déformées par les forces de marée gravitationnelles, résultant de rencontres rapprochées et amenant même, parfois, ces astres à entrer en collision. Des dizaines de photographies spectaculaires du télescope Hubble le montrent et quelquefois, ce ne sont pas seulement deux mais trois, voire quatre galaxies qui sont ainsi prises en flagrant délit de fusion, comme on peut le voir aussi sur les images prises par le télescope Spitzer.
Ces fusions font croître les galaxies en apportant des étoiles et aussi des nuages de gaz qui vont s'effondrer pour en faire de nouvelles, sous l'effet des ondes de chocs résultantes dans le milieu interstellaire. Cette matière baryonique peut aussi alimenter à nouveau les disques d'accrétion des trous noirs supermassifs dormants, ou presque, au cœur des galaxies, et provoquer la naissance de ce que l'on appelle, les noyaux actifs des galaxies. Les plus brillants apparaissent alors comme des quasars.
Ces grandioses événements cosmiques ne se produisent seulement entre de grandes galaxies mais aussi lors de la capture de petites galaxies naines par leurs grandes sœurs, telles la Voie lactée et Andromède. Des traces de ces collisions passées se trouvent d'ailleurs dans ces deux spirales comme l'a montré récemment la mission Gaia dans le cas de notre Galaxie.
Dans approximativement quatre milliards d'années, Andromède et la Voie lactée vont entrer elles-mêmes en collision. L'attraction gravitationnelle entre ces géantes est, en effet, trop forte pour que l'expansion de l'espace qui éloigne de nous d'autres galaxies soit opérante. Mais, selon des calculs faits dans le cadre des simulations numériques du projet Eagle (Evolution and Assembly of GaLaxies and their Environments) qui a déjà servi à modéliser sur ordinateur la formation des grandes structures dans l'Univers observable dans un volume cosmologique de plus de 300 millions d'années-lumière de taille, une autre collision colossale devrait se produire avant.
Un quasar dont la masse devrait décupler
En effet, comme l'explique un groupe d'astrophysiciens de l'Institute of Computational Cosmology, de l'université Durham (UK) dans un article publié dans les Monthly Notices of the Royal Astronomical Society (accès libre sur arXiv), le Grand Nuage de Magellan devrait entrer en collision avec la Voie lactée d'ici deux milliards d'années environ.
Le statut du Grand Nuage de Magellan n'a jamais été très clair, si ce n'est qu'il s'agit de la plus brillante galaxie naine, proche de la Voie lactée à une distance d'environ 163.000 années-lumière. Il a souvent fait débat qu'elle était en orbite autour de la Voie lactée en tant que satellite... Il semble maintenant que son contenu en matière noire soit plus important que ce que l'on pensait, de sorte que sa masse serait en réalité le double de celle estimée précédemment. Or, si tel est le cas, elle subit donc une attraction plus forte de notre Galaxie. C'est pour cette raison que les calculs menés concernant sa trajectoire future pointent aujourd'hui vers une collision avec la Voie lactée, collision qui conduira donc à une fusion.
Les chercheurs de l'Institute of Computational Cosmology vont même plus loin avec leurs travaux. L'apport de matière normale et les perturbations provoquées par l'événement vont transformer notre trou noir supermassif en quasar et conduire cet astre compact, par l'important processus d'accrétion de matière qui se produira alors, à décupler sa masse qui devrait donc atteindre probablement 400 millions de masses solaires.
Le Système solaire et la Terre ne devraient pas être vraiment affectés par l'intense rayonnement du réveil du quasar de la Voie lactée. Mais, bien que cela soit peu probable, il se pourrait que les forces de gravité impliquées dans la fusion du Grand Nuage de Magellan avec la Galaxie conduisent à l'éjection dans le milieu intergalactique de notre Système solaire au sein d'un courant d'étoiles arrachées. D'ici là, de toute façon, les océans de la Terre auront commencé à bouillir du fait de la croissance de la luminosité du Soleil.
Ce qu'il faut retenir
- Certaines étoiles du Grand Nuage de Magellan tournent dans le sens contraire des autres, autour du centre de cette galaxie naine, probablement satellite de notre Galaxie.
- Ses amas globulaires sont soit très vieux, soit jeunes sans amas intermédiaires.
- Ces caractéristiques seraient le vestige d'une fusion entre deux galaxies naines, il y a trois à cinq milliards d'années, selon des simulations numériques.
- De nouvelles simulations numériques, basées sur une ré-évaluation de son contenu en matière noire, laissent penser qu'il entrera en collision avec la Voie lactée dans deux milliards d'années.
- La collision devrait conduire le trou noir central de notre Galaxie à briller plus fortement, rallumant son quasar. Elle pourrait, bien que cela soit peu probable, éjecter le Système solaire de la Voie lactée.
Nuages de Magellan : il y en avait peut-être un troisième il y a des milliards d'années
Article de Laurent Sacco publié le 26/09/2018
Des simulations numériques expliquent certaines caractéristiques étonnantes du Grand Nuage de Magellan. Il aurait avalé une galaxie naine il y a trois à cinq milliards d'années.
Les Nuages de Magellan forment un groupe de deux galaxies naines irrégulières visibles dans l'hémisphère Sud et voisines de la Voie lactée dont elles sont probablement des satellites. Elles n'ont été connues des Européens qu'au XVIe siècle, lorsque Fernand de Magellan les a observées dans le ciel austral lors de son tour du monde. On a d'une part le Grand Nuage de Magellan qui est situé à environ 157.000 années-lumière du Soleil dans les constellations de la Dorade et de la Table, et, d'autre part, le Petit Nuage de Magellan, situé lui à environ 197.000 années-lumière dans la constellation du Toucan.
À l'époque, bien sûr, personne ne connaissait la nature exacte de ces objets nébuleux ni leur distance et il a fallu attendre le XXe siècle, avec notamment Edwin Hubble, pour que l'on ait la preuve qu'il s'agissait bien d'exemples des « univers-îles » proposés par Thomas Wright et Emmanuel Kant. Ils contiennent chacun quelques milliards d'étoiles mais notre Galaxie en contient, elle, pas loin de 200 milliards. Le Petit Nuage de Magellan est 100 fois plus petit que la Voie lactée et le Grand Nuage de Magellan environ 10 fois. Séparés sur la voûte céleste par un angle d'environ 21°, ils sont distants l'un de l'autre d'environ 75.000 années-lumière.
Une présentation des Nuages de Magellan. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © NASA Goddard Space Flight Center, Axel Mellinger, Central Michigan University
Le Grand Nuage de Magellan, une galaxie naine particulière
Les Nuages de Magellan sont bien connus dans le monde de l'astrophysique, surtout depuis l'explosion en 1987 d'une supernova dans le Grand Nuage de Magellan dont les neutrinos produits lors de l'évènement ont été détectés sur Terre, mettant sur la piste du phénomène de l'oscillation des neutrinos, clé de l'énigme des neutrinos solaires. Ils fournissent aussi l'occasion d'étudier des galaxies parmi les plus proches de la Voie lactée et sont donc potentiellement riches en renseignements sur la physique et l'évolution des galaxies.
De ce point de vue, le Grand Nuage de Magellan pose quelques questions. La majorité de ses étoiles tournent dans le sens des aiguilles d'une montre autour de son centre. Mais d'autres tournent en sens inverse, ce qui a laissé penser qu'elles avaient autrefois été arrachées par effet de marée au Petit Nuage de Magellan qui devait être plus proche et en interaction avec son voisin.
Autre détail curieux, les amas globulaires en orbite autour du Grand Nuage de Magellan sont soit constitués de très vieilles étoiles soit d'étoiles plus jeunes. On devait s'attendre à un large spectre interpolant ces deux populations d'amas globulaires mais ceux d'âges intermédiaires manquent à l'appel.
Deux astrophysiciens de l'International centre for radio astronomy research (Icrar) en Australie pensent savoir d'où viennent ces « anomalies » du Grand Nuage de Magellan. Ils l'expliquent dans un article publié dans le journal Monthly Notices of the Royal Astronomical Society.
Elles seraient les vestiges d'un évènement survenu il y a trois à cinq milliards d'années. À cette époque, si des humains avaient existé sur Terre, ils n'auraient pas vu deux mais bien trois nuages de Magellan dont deux étaient en train de fusionner pour donner le Grand Nuage de Magellan. Leur hypothèse est soutenue par des simulations numériques qui reproduisent certaines des traces qu'aurait laissées cette collision suivie d'une fusion entre deux galaxies naines sous forme de disques contenant étoiles et gaz, plongés dans des halos de matière noire.
Un exemple de simulation numérique proposée pour expliquer les caractéristiques du Grand Nuage de Magellan (Large magellanic cloud, en anglais). © Ben Armstrong, ICRAR/UWA.
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